Cet adage des sages d’hier et d’aujourd’hui fait de plus en plus ses preuves comme outil de marketing. C’est le modèle sur lequel s’appuient des artiste de la rue comme Victor Fraser, peintre de trottoirs, dont je parlais la semaine dernière.
Quand le créateur des “Love Letters” qui ornent maintenant le côté nord de l’avenue Danforth (à l’est de 798 Danforth) a entrepris d’enjoliver gratuitement les trottoirs de ce quartier, il ne s’agissait pas exclusivement d’un acte altruiste d’expression artistique.
Au moment où j’écris cette chronique, l’artiste a complété son oeuvre (“Y” et “Z” manquaient encore à l’appel il y a deux semaines). Je l’aurai mentionné dans trois articles et deux blogs, et j’enverrai cette semaine des photos de son alphabet sur Twitter. Il peut s’attendre à faire amplement parler de lui cet été.
En nous offrant son oeuvre, Victor Fraser a en fait troqué son temps pour une visibilité accrue et sans frais dont il ne tient qu’à lui de profiter.
Freemium vs premium
Dans son livre Free, The Future of Radical Price, Chris Anderson (aussi rédacteur en chef du magazine Wired) baptise de “freemium” toute offre gratuite qui peut s’associer à une version “premium” d’un produit ou service.
L’idée de base ici est que quelques consommateurs prêts à payer pour une version supérieure du service subventionnent l’utilisation gratuite de ceux qui sont contents avec la version de base.
Pas convaincus que ça marche? C’est le modèle d’affaire de Flickr, où les utilisateurs qui désirent obtenir plus d’espace pour afficher leurs photos que ce qui convient à 90% des utilisateurs de Flickr, paient des frais annuels très raisonnables.
Concrètement, ça veut dire quoi?
Comme le mentionne Anderson, donner gratuitement nos services n’est pas une solution magique pour devenir riche! Il faut penser créativement aux façons de convertir l’attention et la réputation générées par nos actions gratuites pour les convertir en argent sonnant.
Victor Fraser peut maintenant faire une série de photos de ses lettres et les vendre en cartes postales ou cartes de souhaits aux boutiques locates, en prenant soin de laisser ses coordonnées à l’endos des cartes.
Il peut répertorier sur internet toute mention de son projet (médias, blogs, Flickr) et en envoyer les liens à d’autres blogs et média, afin de décupler sa visibilité. Idéalement, l’artiste devrait avoir une page Facebook publique où les gens peuvent le trouver facilement et où il peut afficher ces liens.
Finalement, fort de plus de crédibilité quand à l’attention que ses oeuvres peuvent apporter à une entreprise, il peut envoyer des liens aux commerces qui pourraient bénéficier de sa forme d’art. Pas plus tard qu’hier, j’ai remarqué que le marchant de thé de mon quartier avait écrit sur le trottoir un grossier “Ice Tea” avec une flèche pointant vers son magasin. Il aurait tout avantage à faire peindre un grand verre de thé glacé désaltérant pour créer un peu l’événement sur la rue, attirer l’attention et ajouter au côté cool de Leslieville.
Le meilleur des scénarios
Le meilleur exemple de qui peut arriver à un artiste talentueux qui tire le maximum des “freemium” est celui de Kurt Wenner, un architecte américain qui s’est découvert une passion pour l’art de la perspective de la Renaissance et a tout lâché pour aller étudier directement à la source, en Italie, en subventionnant son apprentissage par ses dessins de grand maître à la craie sur les trottoirs.
Allez voir les clips sur son site kurtwenner.com. Kurt Wenner s’est bâti une réputation par la qualité et l’originalité de ses oeuvres faites en quelques jours sur les places publiques. On dit qu’il est l’inventeur des dessins de pavée 3D.
Puis des corporations l’ont approché pour réaliser des oeuvres attirant l’attention sur leurs produits. (Absolut Vodka fut la première à lancer cette mode.) Une excellente entrevue avec l’artiste sur le site sunriseartists.com décrit cet univers lucratif des commandites d’oeuvres.
Céééé bôôôô!
Vous êtes fascinés par les dessins de rue de grande en vergure? Je suis tout à fait d’accord avec la liste des top-5 artistes de rue dressée par le bloggeur Bored Panda, accompagnée de photos fantastiques: Edgar Mueller, Eduardo Rolero, Julian Beever, Manfred Stader et, bien sûr, Kurt Wenner.
Peut-être qu’un jour, Toronto embarquera dans le bal des festivals de dessin de rue qui pullulent maintenant à travers le monde (apparemment, juste aux États Unis, il y en aurait entre 50 et 100 par année).
(Chronique parue dans L'Express de Toronto du 3 juillet 2012)
À propos de ce blog
(Chronique parue dans L'Express de Toronto du 3 juillet 2012)
À propos de ce blog
No comments:
Post a Comment